San Antonio, en première ligne face à la vague migratoire 

Des milliers de personnes passent chaque année par San Antonio après avoir franchi la frontière avec le Mexique, à quelque 240 km de là. Une première étape avant de rallier d'autres métropoles américaines à la recherche d'un avenir meilleur.

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Un migrant assis sur un lit de camp dans un refuge à San Antonio, le 29 juin au Texas.
Photo : AFP/VNA/CVN

Des dizaines de migrants attendent devant un foyer du centre de San Antonio, au Texas. La plupart sont des jeunes hommes, mais quelques femmes, parfois accompagnées d'enfants, sont présentes dans la file. Ils ont passé des heures à chercher un abri contre la pluie, et au crépuscule, continuent d'espérer un repas et un toit pour la nuit.

Avant d'arriver, ils ont dû affronter un voyage dangereux, voire mortel. Lundi 27 juin, un camion surchauffé et surchargé a été retrouvé dans cette ville texane: parmi ses passagers, 53 personnes sont décédées, l'un des pires drames de l'immigration aux États-Unis.

Des milliers de personnes passent chaque année par San Antonio après avoir franchi la frontière avec le Mexique, à quelque 240 km de là. Une première étape avant de rallier d'autres métropoles américaines à la recherche d'un avenir meilleur.

Edwin Sanchez est parmi les premiers de la file. Il a quitté son Venezuela natal le 12 mai, est arrivé il y a 5 jours à San Antonio et espère se rendre rapidement à New York, où une connaissance lui a promis un emploi.

"On attend un peu d'aide. Avec un ou deux jours de travail, je pourrai payer le billet", dit-il.

Cet homme de 42 ans est entré aux États-Unis par un poste-frontière en dépit du "Title 42", une mesure héritée de l'ère Trump qui permet d'expulser tout migrant dépourvu d'un visa, même les demandeurs d'asile, au prétexte de la pandémie de COVID-19.

La mise en œuvre de cette mesure est inégale: elle concerne peu les Vénézuéliens et Cubains, davantage les Mexicains et les migrants issus d'Amérique centrale.

Quelle que soit la façon dont ils traversent la frontière, s'ils arrivent du Nord-Est du Mexique, il est probable qu'ils passent par San Antonio, une ville de près de 1,5 million d'habitants.

"Parfait lieu de passage"

Des migrants font la queue pour une distribution de repas dans un refuge à San Antonio, le 29 juin au Texas.
Photo : AFP/VNA/CVN

On y trouve un aéroport, une gare routière et de nombreuses correspondances pour le reste du pays, explique Roger Enriquez, professeur de criminologie à l'Université du Texas de San Antonio.

"Elle est au croisement de grosses autoroutes: la I-10, qui relie la Californie à la Floride, et la I-35, qui va de Laredo, à la frontière sud, jusqu'au Minnesota, dans le nord. C'est un parfait lieu de passage."

Cet emplacement attire malheureusement aussi les passeurs, qui profitent du fait que 63% des habitants soient hispaniques pour passer inaperçus, signale le professeur.

Face à l'arrivée quotidienne de migrants sans ressources, plusieurs associations se mobilisent pour les aider. Corazón Ministries, qui gère le foyer dans le centre-ville, en fait partie.

Ce refuge est ouvert chaque jour entre 19h00 et 08h00 le lendemain, et offre aux migrants un dîner et un lit, indique sa directrice, Monica Sosa.

Près d'elle, peu avant l'ouverture, quelques bénévoles installent des lits de camp frappés du logo de la Croix-Rouge américaine.

Le lieu, censé recevoir environ 150 personnes, en accueille systématiquement davantage, parfois jusqu'à 400, et beaucoup finissent par dormir à même le sol ou dans un parc non loin.

"Les ressources sont très limitées, on a besoin de plus d'aide", assure Monica Sosa.

L'association, financée par des subventions, aide quelques migrants à payer leurs billets de transports, mais voudrait pouvoir faire davantage.

Le lucratif commerce des passeurs

Localisation des décès et disparitions de migrants recensés par le Missing migrants project de l'Organisation internationale pour les migrations sur la route Caraïbes-États-Unis et à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, depuis 2014.
Photo : AFP/VNA/CVN

Austin Hernandez, Hondurien de 20 ans, est arrivé il y a quatre jours et n'a toujours pas pu dormir au foyer.

Dans la file d'attente, il se désole du manque d'aide, mais ne désespère pas d'atteindre sa destination, Austin, à seulement 130 km.

"Le chemin a été très difficile. J'ai été agressé, j'ai mendié de la nourriture dans la rue, sans succès. Il faisait froid, il pleuvait, j'ai dormi dehors."

"Tout ça m'a coûté cher et je n'ai aucun soutien pour me rendre là où je vais", a ajouté le jeune homme, entré aux États-Unis en traversant le Rio Grande pour échapper aux patrouilles.

S'il n'a pas eu recours à des passeurs, le désespoir et le renforcement des contrôles à la frontière poussent certains migrants à mettre leur vie entre les mains de ces personnes.

La découverte des 53 personnes mortes lundi 27 juin est un tragique rappel des risques de ce voyage si lucratif pour les cartels.

"On estime que les passeurs engrangent entre 8.000 et 10.000 USD par personne, et ils peuvent mettre jusqu'à 100 personnes dans un camion, soit un million de profit", explique le professeur Enriquez.

"Je suis surpris qu'il n'y ait pas plus de tragédies, étant donné le danger et les risques que ces gens prennent", a-t-il conclu.

AFP/VNA/CVN

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