France
Recherche : une "loi de moyens" devant les députés, face à la défiance

Les députés ont entamé lundi 21 septembre dans l'hémicycle l'examen du projet de loi sur la recherche, que le gouvernement présente comme un "investissement inédit", mais que la gauche et les syndicats rejettent comme un "trompe-l’œil".

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Pour "réarmer" la recherche, le gouvernement français propose de réinjecter 25 milliards d'euros par étape

Le texte examiné en première lecture est "avant tout une loi de moyens, avec 25 milliards supplémentaires" sur dix ans, soit "le plus grand mouvement d'investissements en faveur de la science depuis la fin des années 50", a insisté la ministre Frédérique Vidal. L'enjeu est de "restaurer notre souveraineté scientifique", a-t-elle lancé, après avoir dressé un tableau très sombre : après "une décennie perdue", "notre recherche étouffe" et "notre communauté scientifique se sent parfois abandonnée".

Maintes fois reporté, fruit de longs mois de discussions et d'auditions, le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) avait été mis sur les rails par l'ancien Premier ministre Edouard Philippe en février 2019. Pour "réarmer" la recherche, le gouvernement propose de réinjecter 25 milliards d'euros par étape : 400 millions en 2021, 800 en 2022, 1,2 milliard en 2023... Avec l'objectif, en 2030, d'un budget annuel de 20 milliards d'euros par an, soit 5 milliards de plus qu'actuellement.

Cela doit permettre au budget de la seule recherche publique d'atteindre 1% du PIB (3% avec la recherche privée), niveau auquel le pays s'était engagé il y a 20 ans. Une part importante vise à revaloriser les carrières des chercheurs. Et plus de 5.000 emplois de chercheurs seront créés. Mais pour les opposants au texte, c'est une "réforme en trompe-l’œil", puisque le gouvernement fait peser l'essentiel de l'effort sur les quinquennats suivants et ne peut "garantir" que 400 millions de plus l'an prochain.

"Déception"

Dans l'hémicycle, la cheffe du groupe socialiste Valérie Rabault a défendu en vain une motion de rejet, soulignant "la grande déception" des chercheurs. Les Insoumis ont critiqué un projet "libéral", les communistes évoqué un "sentiment de gâchis". La droite n'était pas en reste, brocardant une "juxtaposition de mesures technocratiques" sans "vision partagée".

Au sein de la majorité, certaines voix plaident pour réduire à sept ans la programmation budgétaire, pour "un effort plus important en 2021 et 2022". C'est aussi le souhait du mathématicien Cédric Villani (groupe EDS), qui soutient le texte. Mais ce changement de calendrier a été rejeté dans la soirée par l'Assemblée. Au-delà du budget, la philosophie même du projet de loi est décriée, et sa mesure phare visant à distribuer les nouveaux financements principalement par appels à projets, en renflouant l'Agence nationale de la recherche (ANR) à hauteur d'un milliard d'euros. Pour les syndicats, cela pousserait vers une recherche "compétitive et sélective".

Mardi 22 septembre, devant le Palais Bourbon, environ 200 personnes se sont rassemblées derrière une pancarte "Stop LPPR Précarité - Facs Labos en Lutte" et des drapeaux CGT/NPA/SNESUP/PRCF. "Je suis très inquiète pour le financement de la recherche et l'avenir des jeunes chercheurs", expliquait Alix Boulouis, 37 ans, enseignante et chercheuse en biologie à la Sorbonne.

À distance, Pascal Maillard (SNESUP-FSU) a déploré lors d'une réunion syndicale à l'université de Strasbourg, que "le gouvernement s’inscrit dans la ligne des précédents gouvernements et vise à flécher de plus en plus d’argent sur des appels à projet, au détriment des crédits récurrents". Autre point majeur de crispation : la mise en place de voies de recrutements parallèles. Le texte prévoit des nouveaux "parcours de titularisation" à l'américaine ("tenure tracks"), pour accéder à une titularisation au bout de six ans maximum, ainsi que des "CDI de mission scientifique", censés remplacer les CDD à répétition, mais prenant fin avec le projet de recherche associé.

Les opposants craignent une "remise en cause des statuts" et plus de "précarité". Les parlementaires ont débattu dans la soirée des principales orientations de la recherche pour la décennie, ajoutant le développement de l'étude des perturbateurs endocriniens, de la maladie de Lyme et encore des alternatives à l'utilisation d'animaux à des fins scientifiques. La trajectoire financière doit être abordée mardi 22 septembre. Depuis janvier, syndicats et collectifs ont multiplié les actions et fait descendre plusieurs milliers de personnes dans la rue début mars. Le confinement a porté un gros coup d'arrêt à la mobilisation.


AFP/VNA/CVN

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