Paysage villageois du XXe siècle

Les villages traditionnels du Vietnam portent des caractéristiques bien marqués : rizières le long des chemins, haies de bambou, mode de vie au rythme des travaux champêtres. Mais pour chaque région du Nord au Sud : les villages ont leurs propres styles.

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Duong Lâm (en banlieue de Hanoï), un village typique du Nord avec ses maisons à toit de tuiles et cour pavée de briques.

Je n’oublierai jamais cette récitation que j’ai apprise à l’âge de 8 ans, à l’école élémentaire : Mon village.

Mon village est entouré d’une haie de bambous qui fait que, de l’extérieur, on ne peut voir ses maisons. On y entre par un portique en briques. La plupart des maisons sont des paillotes. Chaque maison, ceinte d’une palissade en bambou, possède une cour, un jardin et souvent même une mare. On plante dans le jardin des légumes, de la patate douce et des arbres fruitiers. À part un petit chemin qui traverse le village, il n’y a que des sentiers étroits. Depuis quelque temps, ces voies de communication ont été pavées de briques, ce qui leur donne plus de propreté. Auparavant, quand il pleuvait, tout déplacement était désagréable parce qu’il fallait marcher dans la boue (1).

Pour que le tableau soit complet, il faut ajouter la présence du marché, de la maison commune, de la pagode, de petits temples et autels à ciel ouvert dédiés au culte des lettrés et de Confucius, de différents génies et esprits. La haie vive de bambou, renforcée parfois par un remblai de terre battue et par un fossé, transforme la petite communauté rurale en une île verte au milieu d’une mer de rizières. Elle protège les habitants contre les pirates et autres malfaiteurs ainsi que les typhons, elle fournit un matériau important pour réparer ou construire des temples, des ouvrages publics, ponts et marchés.... Elle est percée de quatre portes (nord, sud, est, ouest), parfois moins, fermées à la nuit tombante par des veilleurs. Devant l’entrée principale, des banians ou des kapokiers offrent une ombre fraîche aux paysans qui reviennent des champs et aux passants qui peuvent se désaltérer à un étal de thé au pied d’un de ces arbres séculaires.

Quatre types de villages au Nord

Tel se présentait le village dans le delta du Nord au XXe siècle. Il garde nombre de ces traits traditionnels malgré les changements dus à l’influence de la civilisation occidentale et urbaine. Au plan topographique, on peut distinguer quatre types de village. Les villages riverains qui s’allongent en général derrière les digues servant aussi de routes ; ils sont établis sur un terrain plus élevé que les rizières derrière ou à côté d’eux ; ils sont souvent victimes de l’inondation, surtout ceux situés entre le cours d’eau et la digue.

Les villages des terres basses sont marécageux et s’étendent entre le principal cours d’eau et ses affluents ; leurs maisons étroites sont bâties sur les élévations de terrain ; à la saison des pluies, l’eau des cours d’eau peut s’élever de plusieurs mètres et submerger complètement les rizières. Les villages de la Moyenne Région sont accrochés aux flancs des collines à proximité des torrents ou rivières ; la population est clairsemée, la terre peu fertile. Les villages côtiers sont construits sur des dunes ; la population, qui a transformé les terres salines en rizières, est dense et vit dans de grandes maisons avec jardin. La topographie des différents types de villages du Nord est dictée par la riziculture en terrain inondé qui a obligé les Kinh (ethnie majoritaire) à quitter le piémont pour s’installer dans la plaine.

Un village dans le delta du Mékong à la saison des crues.

Des changements au Sud

Dans leur progression vers le Sud, jusqu’au delta du Mékong atteint au XVIIe siècle, les villages Viêt ont essaimé. Le village du Sud (dans le delta du Mékong), bien que né du village du Nord (delta du Fleuve Rouge) par une sorte de mitose, s’en distingue sur plusieurs points : se risquant dans une région encore sauvage et très peu peuplée, les premiers émigrants défricheurs, paysans talonnés par la famine, soldats des colonies agricoles, aventuriers, réfugiés politiques de Chine..., s’étaient installés d’abord sur des bancs élevés de terre alluvionnaires avant d’asseoir les villages nouveaux sur des étendues basses le long des multiples petits canaux auxquels les Espagnols ont laissé le nom d’arroyos.

La plupart des communes s’étirent ainsi en longueur au bord des voies d’eau ou des routes ; dépourvues de haie de bambous, elles ne sont pas isolées comme au Nord et parfois elles se touchent. Très jeunes par rapport aux villages du Nord, elles ont une population hétérogène même au plan ethnique (minorités chinoise, cham, khmère...) ; les traditions toutes récentes n’ont pas la rigueur de celles du Nord. La terre et le climat généreux dispensent les paysans des peines et des souffrances qui ont été depuis toujours le lot de leurs frères du Fleuve Rouge. Tout cela explique en partie la mentalité du Sud.

(
Janvier 1995
)
Huu Ngoc/CVN

(1) Quôc van giao khoa thu (Manuel de lecture du cours préparatoire), publié par la Direction de l’instruction publique de l’Indochine française, 10e édition, 1935. La première édition date sans doute des années 1920.

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