Myanmar : funérailles d'une jeune manifestante morte des violences

Le Myanmar a rendu hommage dimanche 21 février à la première victime de la répression militaire, une jeune épicière devenue une icône de la résistance anti-junte, tandis que les foules ont été encore nombreuses à manifester contre le coup d'État malgré les violences meurtrières de la veille.

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Un portrait d'une jeune manifestante anti-junte tuée, Mya Thwate Thwate Khaing, sur une voiture lors de ses funérailles à Naypyidaw le 21 février.
Photo : AFP/VNA/CVN

Les funérailles de Mya Thwate Thwate Khaing, blessée par balles à la tête et décédée vendredi 19 février, ont eu lieu dans la périphérie de la capitale Naypyidaw, en présence de plusieurs milliers de personnes.

Trois doigts levés en signe de résistance au passage du cercueil, la foule a scandé : "À bas la dictature", "Nous nous battrons jusqu'à la victoire", avant de se disperser en silence.

Près de trois semaines après le putsch du 1er février, la mobilisation pro-démocratie ne faiblit pas avec des dizaines de milliers de personnes dans les rues ce dimanche 21 février dans les grandes villes du pays, mais aussi dans des villages reculés.

"Nous sommes prêts à perdre la vie. Nous nous battrons jusqu'au bout", a assuré un manifestant de 26 ans à Rangoun, la capitale économique. "Si nous avons peur, nous ne réussirons pas", à renverser la junte.

Des protestataires se sont aussi réunis à Mandalay, théâtre la veille des violences les plus meurtrières depuis le coup d'État.

Dans cette ville du Centre du pays, la police a tiré sur des manifestants venus soutenir des ouvriers en grève sur un chantier naval pour protester contre le putsch.

"Deux personnes sont mortes, dont un mineur qui a reçu une balle dans la tête", et une trentaine ont été blessées, a indiqué Hlaing Min Oo, chef d'une équipe de secouristes volontaires.

Selon lui, "la moitié des victimes ont été visées par des tirs à balles réelles", et les autres ont été blessées par des munitions en caoutchouc et des tirs de lance-pierres.

Les tirs à balles réelles ont été confirmés par des médecins travaillant sur le terrain, sous couvert d'anonymat par crainte de représailles.

Aucune mention des deux victimes n'a été faite dans le journal Global New Light of Myanmar, contrôlé par l'État, qui a en revanche blâmé les manifestants pour leur comportement "agressif" et indiqué que trois militaires et huit policiers avaient été blessés.

Par ailleurs un homme de 30 ans est décédé samedi 20 février à Rangoun alors qu'il patrouillait près de chez lui dans le cadre d'une initiative citoyenne visant à empêcher les arrestations nocturnes d'opposants au régime. "Il a été tué par la police", a assuré sa belle-soeur.

La télévision d'État a confirmé son décès, assurant que 20 personnes avaient attaqué un véhicule de police qui avait effectué des tirs de sommation pour les disperser.

"Stop terrorisme"

Le pays était sous le choc. "Où est la justice ?", "Stop terrorisme", "Combien de vies doivent être prises avant que le monde réagisse ?", pouvait-on lire sur les réseaux sociaux.

Et cette escalade des tensions a provoqué de nouvelles condamnations internationales.

"L'usage de la force meurtrière, de l'intimidation et du harcèlement contre des manifestants pacifiques est inacceptable", a tweeté le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a appelé l'armée à "mettre immédiatement fin aux violences contre les civils", indiquant que l'Union européenne allait "prendre les décisions appropriées".

Les ministres des Affaires étrangères de l'UE doivent se réunir lundi 22 février pour discuter d'éventuelles sanctions.

Sanctionner les conglomérats ?

Manifestation pro-démocratie devant l'ambassade de Chine à Rangoun, le 21 février.

Des mesures coercitives visant uniquement certains généraux - comme c'est le cas de celles annoncées par les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni - ne suffiront pas, ont averti plusieurs ONG, exhortant à cibler aussi les puissants conglomérats contrôlés par les militaires.

Pékin et Moscou, alliés traditionnels de l'armée birmane aux Nations unies, considèrent, eux, la crise comme "une affaire intérieure" au pays.

La junte fait fi des condamnations.

Les vagues d'arrestations de responsables politiques, d'activistes ou de grévistes se poursuivent. Près de 570 personnes ont été interpellées depuis le 1er février, et seules une quarantaine relâchées, d'après une ONG d’assistance aux prisonniers politiques.

L'acteur Lu Min, tête d'affiche des manifestations à Rangoun, a été arrêté dans la nuit de samedi 20 février à dimanche 21 février, a annoncé sa femme, en pleurs sur les réseaux sociaux.

Les connexions internet ont été coupées pour la septième nuit consécutive, avant d'être restaurées dans la matinée.

Facebook a de son côté annoncé avoir bloqué la page "Tatmadaw True News Information Team" de l'armée pour incitation à la violence. Les généraux ont justifié sur cette page leur putsch et allégué des fraudes lors des élections de novembre, remportées massivement par le parti d'Aung San Suu Kyi, l'ancienne cheffe du gouvernement civil.

La peur des représailles est très forte au Myanmar où les derniers soulèvements populaires de 1988 et 2007 ont été réprimés dans le sang par les militaires.

Malgré cela, parallèlement aux manifestations de rues, les appels à la désobéissance civile se poursuivent avec des médecins, enseignants, contrôleurs aériens ou cheminots toujours en grève.

Aung San Suu Kyi, 75 ans, tenue au secret depuis son arrestation, est inculpée pour des motifs non politiques, accusée d'avoir importé "illégalement" des talkie-walkies et d'avoir violé une loi sur la gestion des catastrophes naturelles. Une audience est prévue le 1er mars.

AFP/VNA/CVN

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