L’iconographe des marchés du Vietnam

Hô Dai Phuoc sillonne depuis près de 20 ans les routes du pays pour photographier les marchés traditionnels. Sa collection compte déjà 2.000 clichés, et il continue de l’enrichir.

Si les Vietnamiens ont l’habitude d’aller au marché tous les jours et à tout moment, rares sont ceux qui ont un jour l’idée d’y prendre des photos. Entre Hô Dai Phuoc et les marchés traditionnels, c’est une passion de 20 ans. Pas pour faire des achats mais seulement pour les observer, y humer l’ambiance et, surtout, les photographier.

Hô Dai Phuoc présente des photos des cinq plus grands marchés du pays: Lung Cu, Dông Xuân, Dông Ba, Bên Thành et Dât Mui.

Le sexagénaire bon pied bon œil raconte que sa passion est née un peu par hasard, un jour qu’il emmenait à moto sa femme et ses enfants au marché de Bên Thành (Hô Chi Minh-Ville). «Là, j’ai eu l’idée de le photographier pour garder des souvenirs de ce lieu symbolique de ma ville natale. J’ai alors acheté un vieil appareil photo et me suis mis à fréquenter ce lieu, puis ensuite j’ai étendu mon rayon d’action», rappelle-t-il.

Il a parcouru la ville de long en large dans cet unique but. Selon les annales historiques, Hô Chi Minh-Ville comptait autrefois environ 210 marchés traditionnels et il en a photographié 205. Encore cinq, et il aura terminé sa collection !

Les marchés municipaux présentent une certaine diversité architecturale, liée à presque un siècle de colonisation française : architecture coloniale, traditionnelle vietnamienne ou mixte. Un certain nombre d’entre eux sont menacés. «Hô Chi Minh-Ville se modernise, et les petits marchés traditionnels doivent subir la rude concurrence des supermarchés et supérettes de proximité. Beaucoup disparaissent. Mais je crois que Bên Thành, Tân Dinh et Bà Chiêu existeront toujours, car ils font partie de l’âme de la ville», dit-il.

M. Phuoc a décidé d’aller bien plus loin pour enrichir sa collection, jusque dans les montagnes du Nord. Tout récemment, il a réalisé un voyage transnational de 38 jours en voiture qui l’a amené jusqu’au marché de Lung Cu, province de Hà Giang, aux confins septentrionaux du pays. «En 20 ans, j’ai photographié 1.863 marchés traditionnels dans tout le pays, explique-t-il. La plupart d’entre eux ont soit été déplacés, soit reconstruits».

Une véritable encyclopédie vivante des marchés

En plus de photographier les marchés, ce Saigonais étudie minutieusement leur histoire et tente de cerner leurs particularités. Hô Phuoc Dai est l’auteur de deux livres, l’un sur les marchés par ordre alphabétique, l’autre selon les villes et provinces, aussi par ordre alphabétique.

«Grâce à ces ouvrages, j’ai découvert qu’il y a cinq marchés baptisés An Hoà dans le pays, quatre qui se nomment Hoà Binh, un certain nombre qui portent des noms d’hommes et de femmes. Celui qui a le nom le plus court est le marché Sy (province de Nghê An), tandis que le nom le plus long revient au marché Vàm Xang Cây Duong (province d’An Giang)», informe-t-il, intarissable.

À l’âge de 67, M. Phuoc peut passer des heures à discourir de l’histoire de tel ou tel marché, de sa date de construction, de son architecture, des marchandises qu’il propose, etc. Il a observé que dans les marchés du Sud et du Centre, les cochons sont enfermés dans un même cage alors que dans les marchés mensuels ou hebdomadaire des montagnes du Nord-Ouest, chaque bête dispose de la sienne.

Grâce à la collection de M. Phuoc et plusieurs autres documents, l’Administration nationale du tourisme et le Centre Guinness Vietnam achèveront prochainement deux ouvrages : l’un sur les marchés originaux et l’autre sur les marchés renommés.

«Les marchés des ethnies minoritaires des régions montagneuses, notamment le Nord-Ouest, m’ont toujours beaucoup impressionné. Les caractéristiques culturelles des habitants locaux sont très bien préservées. Les habits colorés des H’Mông et des Thai donnent à ces marchés une animation particulière», raconte-t-il.

Pour lui, le marché n’est pas seulement un lieu d’échange de marchandises. C’est aussi un lieu où sont préservés des particularismes culturels, où se vivent des moments inoubliables de convivialité, de rencontres, que les supermarchés sont bien incapables de remplacer.

M. Phuoc poursuit sa quête iconographique, faisant fi des remarques de ses proches qui le poussent à lever un peu le pied. «Il y a encore de nombreux marchés dans l’ensemble du pays qui m’attendent», conclut-il.

Linh Thao/CVN

 

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