Les vendeurs de rue face à la pression sanitaire et financière

Malgré les risques d’infection, les vendeurs de rue continuent de transporter encore des marchandises partout à Hanoï pour gagner leur vie. Mais, leurs affaires rencontrent beaucoup de difficultés avec une perte importante de revenus et des périodes d’inactivité.

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Nguyên Thi Thuy avec son stand ambulant plein de casse-croûte.

La plupart des vendeurs de rues sont des femmes venant de la banlieue et de la campagne. Palanche lourde à l’épaule, vélo ou charriot remplis de marchandises, ces femmes parcourent tous les coins de la capitale pour vendre des plats, fruits, légumes, fleurs ou autres… Leur revenu principal dépend surtout du nombre de marchandises vendues. Depuis l’apparition de la pandémie, la vie des vendeurs ambulants est plus difficile que jamais.

À la suite de la directive du Premier ministre Nguyên Xuân Phuc sur les mesures urgentes de prévention et de contrôle du COVID-19, les gens ont dû instaurer une distanciation sociale sur l’ensemble du territoire. Par conséquent, les vendeurs ont perdu presque immédiatement tous leurs clients.

Crise sanitaire et crise financière

Auparavant, les rues comme Lê Thanh Nghi, Ta Quang Buu ou Xuân Thuy rassemblaient nombre de vendeurs de rue avec beaucoup de casse-croûtes attirant les étudiants. Cependant, depuis la crise sanitaire, les étudiants ont quitté les salles de classe pour étudier en ligne et les universités ont fermé leurs portes pendant des mois. Nguyên Thi Thuy, 35 ans, vendeuse de snacks dans la rue Xuân Thuy, a quitté sa province natale de Hai Duong (Nord) pour gagner sa vie à Hanoï il y a sept ans. Chaque jour, avec un vieux vélo chargé de marchandises, Thuy parcourt la rue Xuân Thuy. Un travail peu rémunéré mais qui peut nourrir sa famille. Toutefois, la crise sanitaire est venue tout changer. Il y a même eu des jours où elle ne pouvait gagner que 60.000 dôngs (2,5 euros).

"J’ai perdu presque tous mes revenus. Je dois travailler comme femme de ménage. Je n’ai pas d’autre choix. Je dois gagner de l’argent pour faire vivre ma famille. Sinon mes enfants vont mourir de faim", partage Thuy. Puis, la situation s’est améliorée avec la levée des mesures de distanciation sociale mi-mai. La vie au Vietnam est retrouvée à la normale, et les vendeurs ambulants ont réapparu dans les rues. Mais tout cela n’a duré qu’une dizaine de semaines. La deuxième vague est arrivée et a durement frappé la vie quotidienne des Vietnamiens.

Bien que Hanoï n’ait pas mis en place de nouveau confinement, les autorités locales ont recommandé de limiter les rassemblements publics. Autour du lac Hoàn Kiêm, où la zone piétonne a été interdite vers la mi-août, il est devenu rare de trouver des vendeurs de rue sur les trottoirs. Nguyên Thu Xuyên, 50 ans, est vendeuse de goyaves depuis douze ans. Elle commence ses journées avec une palanche à l’épaule. Sa famille vit des goyaves qu’elle cultive dans son jardin de 900 m2 avec plus de 100 goyaviers, dans le quartier de Dông Du (district de Gia Lâm).

Auparavant, Nguyên Thu Xuyên vendait cinq à six paniers de goyave chaque jour. Ces derniers mois, ce nombre s’est réduit à deux. "Le prix est tombé à 10.000 dôngs le kilo, soit moitié moins qu’avant. Les fruits se périment après deux, trois jours, alors j’accepte de les vendre sans bénéfice", regrette la vendeuse.

Une vendeuse ambulante dans une rue de Hanoï.

Quant à Bùi Thi Là qui vend du cháo suon (bouillie de riz aux côtelettes de porc) dans la rue Ly Quôc Su depuis 30 ans, elle avoue que la pandémie a causé de profonds changements dans sa vie. Son mari est conducteur de cyclo dans le Vieux quartier. Faute de touristes étrangers, il est au chômage depuis mars. Le cháo suon est devenu la principale source de revenus permettant de subvenir aux besoins de la famille. Tous les jours, Bùi Thi Là se lève à quatre heures du matin pour cuisiner le porridge et travaille la journée entière pour un maigre salaire.

"Je vends tous les jours de 06h00 à 19h00. Auparavant, je vendais trois marmites de porridge par jour, mais maintenant je n’en vends qu’une. Mon revenu a baissé de 70%. Récemment, je me suis mise à vendre mes plats via les applications de livraison comme Now et Grabfood".

S’adapter pour s’en sortir

L’épidémie a plongé les vendeurs de rue dans un grand désarroi. Ils sont les victimes indirectes du COVID-19. Certains vendeurs de rue ont dû cesser leur activité tandis que d’autres se sont débrouillés en développant leur commerce en ligne et la livraison à domicile. De nombreux plats ont été vendus sur Facebook - le réseau social le plus populaire au Vietnam. Particulièrement, les applications de livraison comme Grabfood, Now ou Gofood sont devenues un outil puissant connectant vendeurs et acheteurs.

"Auparavant, j’achetais rarement des repas via les applications en raison de l’hygiène et de la sécurité alimentaires. Cependant, depuis l’épidémie de COVID-19, j’utilise plus souvent Grabfood pour acheter mes plats préférés. Avant de commander, je lis toujours les commentaires des acheteurs sur la qualité des produits", partage Thu Hà, 30 ans.

Selon Nguyên Thanh, 20 ans, étudiante, la commande en ligne permet d’éviter les rassemblements dans les rues et le risque d’infection communautaire. "Grâce aux applications de livraison, je ne dois pas sortir de chez moi. En plus, sur les applications, il y a aussi de nombreux codes de livraison gratuits et de réduction (de 10.000 à 70.000 dôngs). Je peux faire des économies lors de l’achat", dit Nguyên Thanh.

La pandémie au Vietnam est sous contrôle, et les vendeurs de rue commencent à retourner dans les rues des villes. Pour certains d’entre eux, le COVID-19 aura profondément transformé leur activité, devant se tourner vers les applications en ligne plus sures et de plus en plus adoptées par les clients.


Texte et photos : Vu Kim Ngân/CVN

(Prix d'encouragement du Concours "Jeunes Reporters Francophones 2020")

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