Le travail peu qualifié, l’autre drame des Vénézuéliens en Colombie

Au Venezuela, ils ne récoltaient pas le café, ne conduisaient pas des vélos-taxis, ni ne vendaient des chocolats dans les bus. Obligés de changer de pays à cause de la crise, les Vénézuéliens ont aussi dû exercer des emplois peu qualifiés.

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Gregory Pacheco, réfugié venezuélien de 29 ans (à droite) sur on vélotaxi le 8 novembre 2017 à Bogota.

Près de 470.000 Vénézuéliens sont arrivés en Colombie, pays voisin, fuyant les graves problèmes politiques et économiques dans leur pays, dont 267.000 l’ont fait de manière illégale, selon le décompte d’octobres des autorités colombiennes.

 Rage 

Claudia Carvajalino regarde ses mains et pleure. Elle a 40 ans et durant une décennie elle a été avocate. Il y a quelques mois, elles a troqué son cabinet de Portuguesa, au Venezuela, pour les champs de café dans le département d’Antioquia.

"Mes ongles et mes mains sont détruites, mais bon, ça se récupère", confie-t-elle à l’AFP. Mais sa résignation est de courte durée. C’est une expérience "très intense...on ressent de la rage, de l’impuissance".

Laissant mari, deux enfants et mère malade derrière, elle a fait ses valises et voyagé en bus durant neuf heures jusqu’à la ville-frontière de Cucuta.

Mais trop de ses compatriotes y cherchaient un travail. Elle préfère alors se rendre à Bogota, où elle envoie CV sur CV à des boutiques et des restaurants. Mais sans succès. Elle tente alors sa chance à Medellin, la deuxième ville du pays. C’est là que, désespérée, elle tombe sur une annonce pour récolter les grains de café.

Au terme d’un dur apprentissage sous le soleil brûlant, elle parvient à récolter 80 kilos de café par jour, pour lesquels elle obtient 12,7 dollars.

En décembre, Carvajalino rentrera au Venezuela pour mieux repartir, après avoir vendu sa voiture. Et, cette fois-ci, avec sa famille.

Angoisse

Jhonger Piña, 25 ans, est un clandestin en Colombie. Entré en juin, il craint d’être déporté. Jean, baskets et casquette, il raconte son départ de Barquisimeto, au Venezuela. La boutique familiale de fruits et légumes a fait faillite au milieu d’une inflation galopante. Il décide alors de partir à Bogota avec un cousin.

Des amis vénézuéliens l’accueillent. Sans papier, cet étudiant en école d’ingénieur monte dans les bus de la capitale, où, faute de marchandise à vendre, il se met à écouler une "curiosité": des billets de banque de son pays.

"Je ne les vendais pas, mais, en échange, les gens m’aidaient et j’ai pu réunir des pesos" colombiens.

En prenant une liasse de bolivars, la monnaie vénézuélienne fortement dévaluée, il explique: "si cette grande quantité d’argent, je l’apportais dans un bureau de change, on ne me donnerait presque rien".

Le véhicule freine et Piña descend, sur ses gardes. Il ne veut pas croiser la police, qui l’expulse parfois des stations. Avec les quelques pesos amassés, il achète désormais des paquets de gâteaux et des chocolats qu’il revend. Il a toujours sur lui ses bolivars. "Je ne perds jamais l’espoir que mon Venezuela redevienne le pays qu’il a été et pouvoir y retourner".

Frustration 

Conduire un vélotaxi est l'un des petits boulots occupés à Bogota par des Venezuéliens ayant fui leur pays en crise

Bienvenue à "Cedrizuela". Le quartier de Cedritos, au nord-est de Bogota, concentre de nombreux migrants du Venezuela. Cela fait sept mois que Gregory Pacheco a quitté son pays et travaille là depuis août. Il a 29 ans, fait des études de communication et a été dans son pays directeur commercial de marques importantes.

En atterrissant dans la capitale colombienne, il pensait pouvoir travailler dans la publicité. "De nombreux étrangers sont allés dans mon pays dans les années 1960 et 1970 et tous ont atteint un objectif, gagner de l’argent", souligne-t-il.

Mais c’est loin d’être son cas. Comme d’autres Vénézuéliens, au volant de son vélo-taxi, il cherche des passagers. Il doit verser 45.000 pesos (15 dollars) par jour au propriétaire de son véhicule et pour gagner 20 dollars, il pédale plus de 12 heures par jour.

"Je savais que ce serait dur, j’étais prêt, mais je n’ai jamais pensé que j’allais finir conducteur de vélo-taxi", explique-t-il.

Pacheco a déjà été rejoint par son épouse, qui a trouvé un travail. Il doit encore pédaler pour faire venir son fils de cinq ans, resté avec ses grands-parents. "Je peux avoir faim, pas un enfant".


AFP/VNA/CVN

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