Le secteur de la pêche manque de main-d’œuvre

La filière pêche fait face actuellement à une pénurie de main-d’œuvre. De nombreux propriétaires de bateaux des provinces du Centre ont été obligés en effet de changer d’emploi. Comment exploiter plus efficacement et de manière durable les ressources ? Analyse.

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Des centaines de bateaux restent ancrés au port de Lach Bang, chef-lieu de Nghi Son, province de Thanh Hoa (Centre), alors même que les premiers mois de l’année sont considérés comme la "saison en or"
Photo : QDND/CVN

Avec un littoral de102 km, la province de Thanh Hoa (partie septentrionale du Centre) a une longue histoire de pêche. Ce secteur d’activité a créé des emplois pour plus de 100.000 personnes. Pourtant, ces derniers temps, les flottes de pêche hauturière (de haute mer) ont éprouvé des difficultés, de moins en moins d’habitants locaux pratiquant la pêche.

Les pêcheurs changent de métier

L’agitation du passé est absente au port de pêche de Lach Hoi, situé dans la ville de Sâm Son de Thanh Hoa, où autrefois de grands paniers remplis de poissons et crustacés fraîchement pêchés étaient transportés à terre puis livrés aux quatre coins du pays. Aujourd’hui, des centaines de bateaux, petits et grands, restent ancrés au port, alors même que les premiers mois de l’année sont normalement considérés comme la "saison en or" pour les pêcheurs.

"Ma famille est liée à ce bateau depuis de nombreuses générations. Auparavant, nous faisions de trois à quatre campagnes de pêche par mois avec 12 ou 14 travailleurs à bord. Depuis deux ans environ, nous rencontrons beaucoup de difficultés en raison de la pénurie de travailleurs", partage Pham Gia Son, patron d’un bateau de pêche. Il fait savoir que certaines personnes ayant travaillé de nombreuses années sur des bateaux de pêche se sont orientées aujourd’hui vers d’autres emplois.

"Bien que nous soyons parfaitement préparés à naviguer au large, notre navire est amarré pendant des jours car nous ne pouvons pas trouver suffisamment de travailleurs", raconte-t-il. Avant d’ajouter que pour certaines campagnes, seuls le patron et l’assistant du commandant sont des professionnels, les autres seulement des travailleurs saisonniers.

Nguyên Van Long est directeur de la Sarl de transformation des produits halieutiques. Son entreprise possède six grands navires spécialisés dans les services logistiques de pêche. Chaque sortie en mer nécessite normalement de 12 à 15 travailleurs, mais ils ne peuvent faire monter à bord aujourd’hui que huit à dix personnes.

En raison du manque de main-d’œuvre, les patrons de pêche doivent embaucher des travailleurs inexpérimentés venant d’autres localités. Nguyên Duc Cuong, chef de l’Office des produits aquatiques de Thanh Hoa, reconnaît que "la pénurie de main-d’œuvre affecte de nombreuses zones côtières. Les revenus instables et le travail difficile poussent en effet les pêcheurs à chercher un autre emploi". D’après lui, la diminution des ressources halieutiques, la réduction de la taille des zones de pêche traditionnelles et donc le faible rendement de la pêche expliquent cette baisse des activités.

En outre, de nombreuses espèces marines montrent des signes de fort déclin et sont même menacées d’extinction. L’effet de la pandémie de COVID-19, les tempêtes, les inondations et les conditions météorologiques extrêmes ainsi que la hausse du coût des carburants ont finalement persuadé beaucoup de pêcheurs à jeter l’éponge.

Vieillissement des pêcheurs

Une situation similaire a été signalée dans d’autres provinces du Centre, notamment à Nghê An, Hà Tinh et Quang Binh. En effet, le nombre de travail-leurs engagés dans la pêche a diminué dans la province de Nghê An ces dernières années. En conséquence, leur âge moyen ne fait qu’augmenter. Il est rare aujourd’hui de trouver des pêcheurs âgés de 18 à 35 ans, 30% de la main-d’œuvre maritime ayant plus de 60 ans.

Nguyên Van Uoc, domicilié dans la commune de Quynh Long, district de Quynh Luu, fait savoir qu’il s’est associé à sept foyers de la commune pour construire un bateau de pêche de 717 CV. Cependant, ils ont dû le vendre à la fin de l’année dernière pour 1,7 milliard de dôngs (73.557 USD), soit moins d’un tiers du coût initial, car il n’y avait pas assez de marins pour s’en occuper.

Bùi Xuân Truc, chef adjoint du Bureau de l’agriculture et du développement rural de Quỳnh Luu, a attribué la diminution de la main-d’œuvre aux lacunes dans l’exploitation et à la conservation des produits de la mer après la récolte et à la concurrence croissante entre les localités. "Cela oblige les activités de pêche à se rénover pour suivre la tendance actuelle", explique-t-il.

Modernisation et durabilité

Le navire de la famille de Lê Van Ky, dans le chef-lieu de Cua Lo, province de Nghê An (Centre), est amarré pendant des jours en raison du manque de travailleurs.
Photo : CTV/CVN

La pénurie de main-d’œuvre ayant gravement impacté les moyens de subsistance des pêcheurs et le rendement des activités de pêche en général, les localités de la région Centre ont adopté des mesures pour faire face aux problèmes. Nguyên Duc Cuong, chef de l’Office des produits aquatiques de Thanh Hoa, informe que la province a encouragé les propriétaires de bateaux à utiliser des équipements modernes dans l’exploitation de la pêche tels que le sonar, et à promouvoir la mécanisation des étapes de la pêche et de la collecte des filets pour améliorer l’efficacité de l’exploitation et réduire les besoins en ressources humaines.

"À court terme, nous suggérons aux localités de mettre en place des politiques de soutien permettant de former les pêcheurs dans d’autres métiers, et ainsi d’éviter les pertes de revenu", souligne M. Cuong.

Lê Câm Long, chef du Bureau de l’agriculture et du développement rural du district de Bô Trach, province de Quang Binh, recommande aux autorités communales de restructurer les métiers et d’étendre les zones de pêche vers la région de Truong Sa (Spratly) afin de capturer des poissons plus précieux tout en réduisant la pression d’exploitation dans le golfe du Tonkin.

Trân Nhu Long, directeur adjoint de l’Office des produits aquatiques de Nghê An, propose ceci : "À long terme, il est nécessaire de prendre des mesures pour régénérer les ressources dans le but de les protéger et de pouvoir les exploiter sans causer de dommage. Ce n’est que lorsque les ressources aquatiques sont bien régénérées et que les gens profitent de l’exploitation que les gens s’engageront à nouveau dans les activités de pêche".

Quant à Lê Ngoc Linh, directeur de l’Office des produits aquatiques de Quang Binh, il propose au gouvernement d’étudier des politiques ambitieuses sur le long terme telles que l’interdiction de la navigation pendant la saison de reproduction des poissons et des soutiens aux pêcheurs en termes de carburants.

Comment protéger les ressources sans mettre à mal la filière ? Telle est l’équation problématique à laquelle tous les pays doivent faire face aujourd’hui.

Huong Linh/CVN

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