Le recyclage mondial en plein chaos depuis que la Chine a fermé sa poubelle

Des montagnes de déchets qui s'entassent dans les pays occidentaux, aux villes d'Asie du Sud-Est qui croulent sous les emballages importés, le circuit du recyclage mondial est en crise depuis que la Chine ne veut plus être la poubelle du monde.

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Des déchets plastiques devant des palmiers, dans une usine de recyclage désaffectée à Jenjarom, près de Kuala Lumpur, en Malaisie, le 8 mars.
Photo: AFP/VNA/CVN

Pour ne plus être la première destination mondiale du recyclage, Pékin a banni début 2018 l'importation de plastiques et de plusieurs autres catégories de déchets qu'elle recyclait jusqu'alors. Les déchets plastiques des pays développés ont commencé à être redirigés massivement vers plusieurs pays d'Asie du Sud-Est où des industriels chinois du recyclage ont transféré leurs activités.

"Ça a été comme un tremblement de terre", a confié Arnaud Brunet, directeur du Bureau international du recyclage (BIR) basé à Bruxelles. "La Chine était le premier marché des déchets recyclables". Et sa fermeture a "créé un choc sur toute la planète". En Asie du Sud-Est, la Malaisie a été la plus affectée. Le pays, qui compte une importante minorité chinoise, est devenu une destination de choix pour les industriels cherchant à déménager leur activité de Chine. Résultat, les importations de plastique du pays ont triplé depuis 2016 pour atteindre 870.000 tonnes l'an dernier, selon des données officielles.

Dans la petite ville de Jenjarom, près de Kuala Lumpur, les usines de retraitement de plastique ont poussé comme des champignons, et se sont mises à émettre des fumées toxiques. Des montagnes de plastique parsèment le paysage. On y trouve toutes sortes de déchets, emballages alimentaires, bidons de lessives ou sacs en plastique venant de France, d'Allemagne, voire des États-Unis ou du Brésil.

Très rapidement, les habitants se sont plaints de l'odeur venant du recyclage des déchets plastiques mais aussi, pensent les défenseurs de l'environnement, de l'incinération des types de plastiques qui ne peuvent pas être recyclés. "Les gens ont été pris à la gorge par des fumées toxiques. Il y en avait beaucoup qui toussaient sans cesse", explique Pua Lay Peng, un habitant de 47 ans. "Je ne pouvais plus dormir, ni me reposer, je me sentais toujours fatigué".

Fumées toxiques

Avec d'autres habitants il a enquêté et mi-2018 avait déjà trouvé une quarantaine d'usines, dont beaucoup sans permis.

Des déchets plastiques dans une usine de recyclage abandonnée à Jenjarom, près de Kuala Lumpur, en Malaisie, le 8 mars.

Après de nombreuses plaintes sans réponse, les autorités ont finalement agi. Des usines ont fermé et les permis d'importation de plastique ont été gelés temporairement. En septembre, 33 usines avaient fermé à Jenjarom et la qualité de l'air s'est améliorée même si les amoncellements de plastique sont restés. Les défenseurs de l'environnement pensent que les opérations de recyclage ont été déplacées ailleurs.

Pour les pays occidentaux, qui se reposaient sur la Chine, chercher de nouvelles destinations capables de retraiter leur trop plein de déchets est aussi un casse-tête. Alors que les industriels du recyclage estiment souvent que les coûts sont trop élevés pour retraiter les déchets dans leur pays d'origine, certains ont eu recours aux décharges ou aux incinérateurs faute de mieux.

"Au bout d'un an, nous en sentons toujours les effets mais nous n'avons pas encore avancé vers une solution", déplore Garth Lamb, président de l'association australienne de l'industrie du recyclage et du traitement des déchets. Certains pourtant ont su s'adapter. La ville d'Adelaide, dans le Sud de l'Australie, qui expédiait l'essentiel de ses déchets en Chine retraite désormais sur place 80% de ses détritus, la plupart des déchets restants étant envoyé en Inde. "En aidant les acteurs locaux, nous avons été capable de retrouver des prix similaires à ceux d'avant l'interdiction chinoise", souligne Adam Faulkner, responsable de l'organisme qui gère les déchets du Nord d'Adelaide.

Consommer moins de plastique

En Chine, les importations de plastique ont chuté de 600.000 tonnes par mois en 2016 à 30.000 tonnes par mois en 2018, selon les chiffres d'un nouveau rapport de Greenpeace et de l'ONG Alliance globale pour les alternatives à l'incinération (GAIA).

Des déchets plastiques originaires des États-Unis, d'Espagne et de France, dans une usine de recyclage abandonnée de Jenjarom, près de Kuala Lumpur, en Malaisie, le 8 mars.

Des zones entières dédiées au recyclage ont été abandonnées. Dans la ville de Xingtan au sud du pays, où le secteur était florissant, "les usines de recyclage sont parties, il y a des panneaux +A louer+ sur les bâtiments et on voit des annonces pour recruter des employés expérimentés au Vietnam", explique à l'AFP Chen Liwen, fondateur de l'ONG Zero Waste Alliance en Chine.

Si la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam, premiers pays visés par les industriels, ont pris des mesures pour limiter les importations de plastique, les flux ont été redirigées vers d'autres pays moins régulés comme l'Indonésie et la Turquie, selon le rapport de Greenpeace.

Mais alors que 9% seulement du plastique produit est recyclé, la seule solution à long terme est de fabriquer et de consommer moins de plastique, plaide l'organisation de défense de l'environnement. "Les circuits de recyclage n'arrivent pas rattraper la production de plastique", souligne Kate Lin, chargée des campagnes de l'organisation.


AFP/VNA/CVN

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