La légende de Tu Thuc (Suite et fin)

Comme souvent, l’amour donne des couleurs sublimes aux contes et légendes. Laissez-vous bercer par cette féérique histoire que l’on raconte encore sous les étoiles du côté de Thanh Hoá !

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Dans la grotte de Tu Thuc, province de Thanh Hoá (Centre), où Tu Thuc a rencontré la fée Giáng Huong.
Photo : CTV/CVN

Rappelez-vous qu’un matin, Tu Thuc se leva et erra dans une région aux paysages miraculeux. De tous côtés, ce n’étaient que palais richement décorés, arbres verts et riants, comme en quelque lieu de pèlerinage. Tu Thuc jouissait de cet enchantement. Puis, son attention fut attirée par deux jeunes suivantes vêtues de bleu. L’une disait à l’autre : "Voilà déjà notre jeune marié !". Elles disparurent dans le palais pour annoncer Tu Thuc, puis revinrent s’incliner devant lui : "Le Seigneur est prié d’entrer".

Le monde féérique

En suivant les deux jeunes filles, il vit des murs couverts de brocart, des portes laquées de rouge, des appartements défendus resplendissants d’argent et d’or, sur lesquels il lut au passage: "Ciel de Jade", "Lumière de Gemmes". En haut, il trouva une fée vêtue de soie blanche qui l’invita à s’asseoir dans un fauteuil de santal blanc. Puis, elle lui dit : "Vous qui vous plaisez parmi les sites pittoresques, savez-vous quel est cet endroit ? Et vous souvenez-vous d’une certaine rencontre prédestinée ?".

Tu Thuc répondit : "Il est vrai qu’en fidèle amant des lacs et des fleuves, j’ai erré en bien des lieux, mais je ne savais pas qu’il existait ici un paysage digne des bienheureux. Simple mortel ami des loisirs, je vais où ne conduisent mes pas, ignorant tout de mon destin. Oserai-je vous demander de m’éclairer ?". La fée eut un sourire. "Comment auriez-vous pu connaître cet endroit ?, dit-elle. Vous êtes dans la 6e des 36 grottes du mont Phi Lai. Celui-ci court sur toutes les mers, sans toucher le sol nulle part. Né des vagues et de la pluie, il se forme et s’évanouit selon les vents. Je suis la fée du mont Nam Nhac et mon nom est Nguy. Je connais la noblesse de votre nature et la qualité de votre âme, c’est pourquoi je vous ai accueilli ici".

Elle se tourna vers les suivantes qui comprirent l’ordre muet et se retirèrent. Peu après, une jeune fille entra. Tu Thuc, levant discrètement les yeux, reconnut en elle la jeune fille qui brisa un jour la branche fleurie. La fée reprit : "Ma fille s’appelle Giáng Huong, c’est-à-dire l’Encens vermeil. Quand elle descendit à la fête des fleurs, il lui arriva un malheur. C’est vous qui l’avez sauvée. Je n’ai jamais oublié ce bienfait sans prix, et je lui permets maintenant de lier sa vie à la vôtre pour payer sa dette de reconnaissance". Les fées de toutes les grottes furent invitées au mariage, qui fut célébré dans la musique et dans les chants.

Après son mariage, les jours coururent comme le vent et Tu Thuc s’aperçut vite qu’il avait passé un an au royaume des fées. Il fut pris de nostalgie. Souvent le soir, il restait immobile jusqu’à l’heure où la nuit fraîchit sous la rosée. La brise passait, les vagues en montant mouraient à ses pieds et il n’arrivait pas à s’endormir. La nuit douce attisait sa tristesse. Le clair de lune qui baignait les monts immenses le laissait indifférent. Parfois, un air de flûte au loin fit fondre soudain son cœur et le tint éveillé jusqu’à l’aurore. Il chercha alors à entendre comme autrefois les coqs chanter dans son village.

Un jour, en regardant vers le sud, il vit une barque sur la mer. La montrant, il dit : "Elle va du côté de mon pays. C’est bien loin, et je ne sais pas où il se trouve exactement, mais c’est par là...".

La lettre de soie

Il finit par confier à Giáng Huong: "Mon chérie ! Tu sais que je suis parti pour une promenade d’un matin et voilà déjà bien longtemps que je suis absent. Il est difficile d’étouffer à jamais les sentiments de mon cœur et tu vois que je pense encore beaucoup à mon vieux village... Que dirais-tu de mon désir de rentrer quelque temps chez moi ?". Giáng Huong parut hésiter à l’idée d’une séparation. Tu Thuc insista : "Ce ne sera qu’une question de jours, de mois tout au plus. Que je donne mes nouvelles à ma famille, à mes amis, tout sera vite réglé et je remonterai au royaume des fées, sans retard".

Giáng Huong répondit en pleurant : "Je n’ose invoquer l’amour conjugal pour m’opposer aux desseins de mon époux. Seulement, les limites du monde d’en bas sont étroites, ses jours et ses mois bien courts. J’ai peur que mon époux ne retrouve plus le visage familier d’un temps révolu... Mais où sont le saule de la cour et les fleurs du jardin ?". Elle s’en ouvrit à la Grande Fée, qui exprima ses regrets : "Je ne pensais pas, dit-elle, le voir encore enchaîné au monde de poussière rose. Laisse-le partir ! Pourquoi tout ce chagrin ?".

Stalactites dans la grotte de Tu Thuc.
Photo : CTV/CVN

Au moment des adieux, Giáng Huong essuya ses larmes et remit à Tu Thuc une lettre écrite sur une feuille de soie. Elle le pria de ne l’ouvrir qu’une fois arrivé. Tu Thuc monta sur le char et, en un clin d’œil, se retrouva dans son vieux village. Tout lui apparut différent de ce qu’il avait connu autrefois, les paysages, les maisons et les hommes. Seuls étaient restés dans le même état les deux bords de la source dans la montagne.

Il se fit connaître auprès des anciens du village, en donnant son nom. À la fin, l’un d’eux se souvint : "Quand j’étais tout petit, dit-il, j’ai entendu raconter que mon aïeul portait ce nom. Un jour, il y a plus de 80 ans, il alla dans la montagne, et il n’en est jamais revenu. Pour moi, il a dû tomber dans quelque ravin. C’était à la fin de la dynastie des Trân (du XIIIe siècle au début du XVe siècle), et nous sommes maintenant sous le 4e roi des Lê postérieurs (1428-1789)".

Se sentant seul et triste, Tu Thuc voulut remonter d’où il était descendu. Mais le char s’était transformé en un phénix, et l’oiseau fabuleux, s’envolant, disparut dans le ciel. Tu Thuc ouvrit la lettre et lut ces lignes :

"Au milieu des nuages, se noua une amitié de phénix,
De l’union d’antan, c’est déjà la fin.
Au-dessus des mers, qui cherche des traces d’Immortels ?
D’une rencontre future, il n’est guère espoir"
.

Il comprit alors que l’adieu était sans retour. Mais quelque temps plus tard, revêtu d’un léger manteau, coiffé du chapeau conique, Tu Thuc entra dans la montagne jaune dans la région de Nông Công de la province de Thanh Hoá (Centre). Et il ne revint point. On ignore s’il est remonté au royaume des fées ou s’il s’est perdu dans la montagne.


Ông Ngoai/CVN

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