La justice américaine accuse Walmart d'avoir alimenté la crise des opiacés

Malgré les tentatives de Walmart d'allumer un contre-feu, la justice américaine a décidé de poursuivre le géant de la distribution, l'accusant d'avoir alimenté la crise des opiacés qui a fait des centaines de milliers de morts aux États-Unis.

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L'enseigne d'un magasin Walmart à Washington DC.
Photo : AFP/VNA/CVN

Le ministère de la Justice demande "des sanctions au civil qui pourraient se solder en milliards d'USD", indique-t-il mardi 22 décembre dans un communiqué. Selon le ministère, Walmart "a distribué illégalement des substances réglementées et sous ordonnance au plus fort de la crise des opiacés" dans les pharmacies que le groupe exploite à travers les États-Unis.

"Étant l'une des plus grandes chaînes de pharmacies et l'un des plus grands distributeurs de médicaments du pays, Walmart avait la responsabilité et les moyens d'aider à prévenir le détournement d'opiacés", a estimé Jeffrey Bossert Clark, procureur général adjoint par intérim, cité dans le communiqué.

"Au lieu de cela, et pendant des années, (Walmart) a fait le contraire : accepter des milliers d'ordonnances invalides dans ses pharmacies et omettre de signaler les ordonnances suspectes d'opiacés", a-t-il ajouté, soulignant que "ce comportement illégal a contribué à l'épidémie d'abus d'opiacés à travers les États-Unis".

La justice s'est appuyée notamment sur les déclarations de responsables du groupe ayant fait état d'une "énorme pression pour traiter les ordonnances".

Il fallait à tout prix "stimuler les ventes" et traiter vite les ordonnances pour fidéliser la clientèle, selon l'un d'entre eux.

Walmart a réagi en affirmant que les poursuites du ministère de la Justice étaient "entachées par des violations éthiques historiques et que ce procès invente une théorie juridique qui force, de manière illégale, les pharmaciens à se placer entre les patients et leurs docteurs, qui est truffé d'erreurs factuelles et qui sélectionne des documents en les sortant de leur contexte".

Des cachets de l'anti-douleur Oxycodon, distribué sur ordonnance, le 18 septembre 2019 à Washington DC.
Photo : AFP/VNA/CVN

La dépendance aux médicaments opiacés a fait près de 450.000 morts aux États-Unis entre 1999 et 2018, selon les dernières estimations des Centres de prévention des maladies (CDC).

Leur consommation a explosé à partir de 2013, conduisant le président Donald Trump à déclarer une "urgence de santé publique" en 2017.

Cette crise a même été jugée responsable de la baisse de l'espérance de vie aux États-Unis entre 2014 et 2017.

"Porter le chapeau"

L'annonce du ministère de la Justice intervient deux mois jour pour jour après la plainte déposée par Walmart devant un tribunal du Texas.

Le groupe se disait alors victime d'une tentative injuste du gouvernement de lui faire "porter le chapeau" pour la surconsommation de médicaments opiacés ultra-addictifs.

Dans sa plainte, la chaîne de supermarchés - qui compte quelque 5.000 magasins aux États-Unis, avec presque tous des points pharmacie - estimait qu'en reprochant à ses pharmaciens de ne pas avoir refusé de fournir des opiacés prescrits par les médecins, le ministère de la Justice et la DEA, agence chargée de la lutte contre les drogues, mettaient les pharmaciens "dans une position intenable".

Poussée par un marketing agressif des laboratoires pharmaceutiques, auprès des médecins surtout, la prescription de médicaments anti-douleur opiacés, jusque-là réservés aux maladies graves, a explosé.

Walmart accuse la DEA de chercher à se dédouaner de ses "profondes erreurs" dans la gestion de cette crise: des audits ont en effet conclu que l'agence fédérale n'avait pas, comme elle aurait dû, empêché les laboratoires de produire des quantités toujours plus importantes de ces médicaments ni, dans 70% des cas, retiré leur licence aux médecins dont les ordonnances étaient mises en cause.

À en croire la plainte, le ministère et la DEA s'acharnent contre Walmart, en dépensant depuis plusieurs années des sommes considérables pour une enquête qui, faute de déboucher sur des poursuites pénales, viserait maintenant à lui arracher des dommages substantiels au civil.

Le groupe a demandé au tribunal texan de dire clairement que le groupe et ses pharmaciens n'avaient pas les responsabilités légales que voudraient lui attribuer le gouvernement et la DEA.

Pour l'heure, cette plainte n'a pas abouti.

D'autres grands distributeurs de médicaments américains - comme Cardinal Health ou McKesson - ont été attaqués par le passé en justice par des autorités locales ou des États, qui les accusaient d'avoir fermé les yeux sur des millions d'ordonnances de médicaments opiacés alors qu'ils les savaient addictifs.

Un règlement à l'amiable avait notamment été trouvé entre trois distributeurs et deux comtés de l'Ohio en octobre 2019.

AFP/VNA/CVN

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