Hai Bang, le papier d'art jusqu'à l'obsession

Depuis une dizaine d'années, le designer Phan Hai Bang se passionne pour les études de fabrication artisanale du papier. Il veut créer un "papier d'art", et des œuvres d'art confectionnées à partir de ce dernier.

Enseignant en design à l'École supérieure des arts (Université de Huê, Centre), Phan Hai Bang poursuit depuis 11 ans des études de fabrication artisanale du papier. "En tant que designer, j'ai toujours été très exigeant sur les critères techniques et esthétiques des papiers que j'utilise, que l'on ne peut satisfaire avec les procédés de fabrication industriels", avoue-t-il. Et d'expliquer : "Ces papiers spéciaux sont la base de mes travaux de designer".

En 2007, Phan Hai Bang a eu la chance d'obtenir une bourse du Fonds d'Asie de bourses d'études qui lui a permis de participer à un projet d'études sur le papier artisanal du sous-continent. Pendant sept mois, il a travaillé dans des ateliers de fabrication de papiers artisanaux, au nord de la Thaïlande. Après ce stage, Phan Hai Bang s'est rendu compte que "l'orientation de mes travaux concernant la fabrication artisanale du papier s'avère juste" et que "j'aime passionnément le papier".

D'après ce designer, le type de papier qui convient le mieux aux compositions graphiques et artistiques, à la création picturale, c'est le papier do (rhamnorenon), matière artisanale utilisée par les Vietnamiens. Le papier do a des caractéristiques qui font de lui un support de choix, alliant légèreté, spongiosité, résistance et durabilité... Ce papier artisanal du Vietnam et d'autres d'origine chinoise, thaïlandaise et japonaise (washi) sont et ont été utilisés depuis très longtemps par les peintres et les graveurs... Aujourd'hui, des décrets royaux, faits de papiers artisanaux et datés de plus de 500 ans sont encore conservés intacts.

La papier est déjà en soi une œuvre d’art

Mais le papier do est produit très petite quantité, faute de matières premières. Rares sont les fabricants qui en proposent, d'où son coût, parfois prohibitif. Le plus souvent, les différents types de papier do vendus sur le marché, sont composés de différentes matières. "Impossible d'utiliser ces types de papier pour les compositions graphiques et créations artistiques", conclut Phan Hai Bang, en criant au sacrilège.

De cette réalité, ce designer-enseignant décide alors de fabriquer son propre papier pour remplacer le papier do, tout en satisfaisant aux exigences que réclament les créations artistiques. Phan Hai Bang souligne qu'il crée des œuvres en papier, mais ne le fabrique pas. "Car le papier fabriqué par moi est déjà en soi une œuvre d'art", déclare-t-il. Et lui n'a qu'un désir : transformer les matières comme bambou, paille, banane, canne à sucre, plante flottante, herbe à paillote, voire les ordures ou les chiffons de coton... en œuvre d'art.

Grosso modo, le procédé de fabrication du papier de Phan Hai Bang ressemble à celui du papier do, par son côté artisanal.

Les matières principales pour sa fabrication sont les écorces de certains végétaux comme le bambou, la canne à sucre, la paille, l'herbe à paillote... Ces matières sont écorcées, macérées, bouillies, pilonnées, puis étalées (sur un cadre pour en faire une feuille de papier), comprimées et séchées. Ces étapes sont entièrement réalisées à la main. Avec les caractéristiques naturelles des écorces, les fibres cellulosiques végétales qui composent le papier s'imbriquent les unes aux autres, formant différentes couches homogènes. Durant la fabrication, aucun produit chimique n'est incorporé, ce qui donne un papier lisse, fin, rigide, spongieux et résistant au sens propre du terme comme dans le temps. Autre caractéristique : le grammage de ces papiers (au mètre carré) est moitié moindre de celui des papiers produits industriellement. Ne répondant pas aux gabarits fixés par la papèterie industrielle, chaque feuille fabriquée par Phan Hai Bang est de la dimension et de l'épaisseur souhaitée. Lui seul se fixe ses contraintes. "En bref, je peux décider de toutes les caractéristiques que je souhaite donner au papier, de sorte qu'il soit le meilleur support possible à un travail artistique, graphique bien précis...", déclare le designer.

Au début de cette année, la direction de l'École supérieure des arts de Huê a fourni à Phan Hai Bang un atelier de fabrication du papier, situé dans l'enceinte de l'établissement. Avec les efforts de notre homme, l'École supérieure des arts de Huê est ainsi devenu le premier établissement disposant d'un tel atelier. L'école en a d'ailleurs profité pour définir un nouveau programme et l'atelier est devenu en très peu de temps un lieu de travaux pratiques pour les étudiants. "Cet atelier de fabrication de papier favorise nos étudiants à s'investir davantage en leur donnant de l'inspiration pour leurs créations artistiques", affirme le doyen de l'école, Phan Thanh Binh. Et Phan Hai Bang est très ravi de transmettre aux étudiants les techniques, procédés de fabrication traditionnelle de papier du Vietnam, et par extension de l'Asie du Sud-Est.

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