"Être de retour au Vietnam me rend déjà très heureuse"

La scénariste française Trân Hai Anh, qui a grandi à Paris, avait hâte de retourner travailler dans son pays d’origine, le Vietnam. Une décision naturelle mais pas si facile, notamment en pleine crise sanitaire. Récit de ses journées inoubliables dans un centre de quarantaine du pays.

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La scénariste française d'origine vientamienne, Trân Hai Anh.
Photo : Nelly Nguyên/CVN

Fille de Vietnamiens résidant en France, la jeune scénariste Trân Hai Anh (@heyy_ann) entretient des liens intimes avec son pays d’origine, le Vietnam. Depuis l’enfance, Hô Chi Minh-Ville est sa "deuxième maison" où elle revient au moins une fois chaque année.

Après son séjour dans la mégalopole du Sud lors du Têt 2020, Trân Hai Anh décide de s’y installer afin de finir des projets en cours. Mais son retour quelques mois plus tard ne se passa pas comme prévu. La pandémie avait profondément bouleversé la vie quotidienne partout dans le monde, en France mais aussi au Vietnam.

"La liste d’attente était longue et depuis l’Europe, il n’y avait qu’un à deux vols par mois. Après plusieurs mois sans nouvelle de l’ambassade, on m’a finalement trouvé une place sur le vol Paris - Hanoï du 1er août 2020".

Adaptation à la quatorzaine

Trân Hai Anh fait partie des citoyens et citoyennes bénéficiaires des vols de rapatriement opérés par le gouvernement vietnamien. Certes, elle avait déjà fait des recherches sur la quatorzaine obligatoire au Vietnam et savait qu’elle serait immédiatement amenée vers un établissement de mise en quarantaine dès sa descente de l’avion, mais c’était autre chose d’en vivre l’expérience.

"Avant l’embarquement, la compagnie aérienne nous a fournis une tenue de protection complète comprenant également gants et lunettes. L’atterrissage a été très émouvant pour tout le monde, car on était tout soulagé d’être enfin à la maison".

Elle a dû ensuite remplir un formulaire de déclaration sanitaire et tous ses bagages "ont été généreusement arrosés de désinfectants". Quelques heures plus tard, elle a été amenée au camp militaire de Hung Yên, à une vingtaine de kilomètres de Hanoï.

À l’intérieur du camp militaire. Le ruban, qui matérialise la zone de quarantaine
à ne pas franchir, séparait nos quartiers de ceux des militaires.
Photo : NVCC/CVN

La jeune française fut alors tout de suite impressionnée par l’organisation de cet endroit. "Les femmes ont été installées au rez-de-chaussée et les hommes au premier étage. Nous faisions nous-même le ménage au quotidien… À notre arrivée, on nous a distribué un kit avec le nécessaire pour dormir, faire notre toilette et notre lessive. Il y avait du wifi et les médecins nous ont également achetés des cartes sim 4G".

La vie dans un camp militaire est une expérience unique. Pendant la quatorzaine, tous les citoyens rapatriés de l’étranger doivent être testés au moins deux fois au nouveau coronavirus. Malgré les circonstances exceptionnelles, l’adaptation à la vie de camp s’est faite sans soucis pour tous les rapatriés et une routine s’est dessinée dès les premiers jours.

Deux fois par jour, les médecins viennent prendre sa température. "Ils étaient toujours très attentionnés et de bonne humeur. C’était comme une relation entre grand frère et petite sœur. Plus les jours passaient, plus ils devenaient blagueurs".

Tous les jours, elle était réveillée à 06h00 du matin par "une cloche sonnée par un militaire". Les journées s’écoulaient entre longues discussions, musique, jeux divers et variés : "cartes, loup garou ou +đá cầu+".

"Le soir, des séances de films s’improvisaient dans certaines chambres pendant que d’autres restaient éveillées jusqu’à 04h00 du matin pour suivre la Ligue des champions".

En fin d'après-midi, on ressort pour jouer au plumfoot ou cueillir des fruits. Il ne restera probablement plus de longanes ni de pomelos après 14 jours.
Photo : NVCC/CVN

Un pays qui lui reste encore à découvrir

Atterrir à l’aéroport de Vân Dôn dans la province de Quang Ninh (Nord), où se trouve la baie de Ha Long, fut une expérience sans précédent pour la Française. "Le paysage à travers le hublot était à couper le souffle. Cela m’a rappelé à quel point les paysages au Nord sont magnifiques et que je ne les connais malheureusement pas assez. Je me suis promise de m’accorder plus de temps pour voyager et découvrir plus en profondeur ce beau pays".

Récemment, Trân Hai Anh a publié une série d’articles en vietnamien sur le quotidien Tuổi trẻ (Jeunesse) concernant "l’accent des Viêt kiêu" et "les rideaux métalliques des commerçants vietnamiens à Paris". Des récits que la jeune scénariste préparait depuis plusieurs années et qu’elle a finalisés pendant ses semaines de confinement en France, avec l’aide de son père.

Ses prochains projets comprennent majoritairement la réalisation et la production de films de "tous formats et genres confondus".

En 2018, avec les soutiens de la communauté franco-vietnamienne en France et au Vietnam ainsi que de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), elle a gagné en notoriété en co-réalisant avec la slammeuse George Ka le clip musical "Saigon", qui parle du "métissage en général qu’il soit biologique ou culturel". Les retours sur les plateformes en ligne étaient impressionnants, et le public vietnamien a pu mieux comprendre les jeunes Viêt kiêu comme Trân Hai Anh.

Elle prépare en ce moment son premier roman graphique intitulé SỐNG, fruit d’une coopération avec son amie illustratrice Pauline Guitton, qui sortira en 2022 aux Éditions Ankama.

"C’est le témoignage d’une adolescente vietnamienne dans le maquis pendant la guerre du Vietnam. C’est l’histoire d’une transmission d’une mère à sa fille, c’est notre petite histoire mêlée à la grande".

Propos recueillis par Dang Duong/CVN

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