Celui qui compte les grues à tête rouge

Danh Hiên (photo ci-contre), un paysan d'ethnie Khmer, est fier de son surnom "celui qui compte les grues à tête rouge". C'est un travail bénévole qu'il assume depuis une trentaine d'années, avec responsabilité et joie.

Originaire du village de Ba Nui, commune de Binh An, district de Kiên Luong, province de Kiên Giang (Sud), Danh Hiên n'a jamais quitté sa terre natale, où se trouve un immense champ de souchet (plante de marais). Il est père d'une famille nombreuse qui ne roule pas sur l'or. Depuis une trentaine d'années, Danh Hiên travaille dans une carrière de pierre située au pied de la montagne de Son Trà, près de chez lui. La vie difficile a obligé ses enfants à arrêter leurs études dès le primaire, pour suivre leur père dans la carrière.

L'amour de la nature

Chose admirable, cette famille pauvre protège la nature qui l'entoure. "Ma maison n'est distante que de 100 m du champ de souchet. Au crépuscule, les grues y viennent en bande pour dormir. Quelle joie pour nous de pouvoir contempler de nos propres yeux ces gros et superbes oiseaux", confie Danh Hiên. D'ordinaire, les grues restent à Kiên Luong de janvier à avril. Et de repartir juste à la saison des pluies. Pendant ces quatre mois, le champ de souchet devient leur dortoir préféré. Chaque jour, les oiseaux s'en vont loin, dès le petit matin, pour rechercher de la nourriture, et rentrent au crépuscule.

"Au début, par curiosité, j'ai voulu savoir combien d'oiseaux rentraient chaque jour. Et puis cela a commencé à m'intéresser de plus en plus", raconte Danh Hiên.

Ca fait déjà une trentaine d'années que le paysan compte les grues. À chaque saison sèche, il guette leur retour.

Soutien d'une société internationale

Un beau jour, l'ambassadeur du Danemark au Vietnam et le Docteur ès sciences Trân Triêt, tous les deux membres de la Société internationale pour les grues à tête rouge, sont venus lui rendre visite. Danh Hiên les a guidés pour une visite sur le terrain. À son tour, le Docteur Trân Triêt lui a fourni des informations sur cette espèce rare, et espérant qu'il puisse jouer le rôle de relais auprès de la population locale, "pour que tout le monde participe volontairement à la défense de l'habitat des grues", explique-t-il. Depuis ce jour là, "Celui qui compte les grues" est devenu un collaborateur actif du docteur Trân Triêt. Équipé désormais d'une paire de jumelles, Danh Hiên note dans un carnet le nombre d'échassiers, matin et le soir, et aussi le nombre de jeunes. Selon lui, cette espèce vit en famille de trois membres : père, mère et jeune. En écoutant les vocalises des grues, différentes d'un moment à l'autre, Danh Hiên peut savoir si elles partent ou rentrent. "C'est en rentrant que les grues chantent en chœur. Mais, elles gazouillent lorsqu'elles veulent chercher un partenaire", éclaire-t-il. En regardant la direction de leur vol, il peut savoir où les oiseaux iront chercher leur nourriture ce jour-là : Nui Mây, Nui Huynh, Lung Lon, ou Lung Kha Na, Hoa Diên…

Un guide volontaire

À la saison sèche, la maison de Danh Hiên devient une sorte de gîte rural, où se croisent tous ceux qui s'intéressent à cet oiseau rare : naturalistes, scientifiques, journalistes, photographes, cameramen ou simples curieux. Il leur fournit des informations, leur indique la meilleure place pour prendre des photos, filmer...

En 2010, le nombre de grues à Kiên Luong a été "beaucoup moins important qu'auparavant", déplore Danh Hiên, qui s'inquiète de voir le nombre de ses petits protégés baisser d'année en année. Selon le Docteur Trân Triêt, il semblerait que le champ de souchet soit plus inondé qu'autrefois, à la suite de travaux d'aménagement par la population locale. Or les grues préfèrent des lieux très faiblement inondés. Elles dorment sur une patte, vigilantes, prêtes à décamper dare-dare si on les dérange. Des responsables de la Société internationale pour les grues à tête rouge ont présenté la situation à l'administration locale, espérant qu'une solution sera trouvée dans l'avenir qui conviendra à la fois aux paysans locaux et aux grues.

Par sa passion communicative, "celui qui compte des grues" a réussi à convaincre d'autres personnes de protéger la nature. Récemment, la compagnie Tenamyd Pharma Cop. et l'Association de soutien aux malades pauvres lui ont offert une "maison du cœur", ou "une maison de rêve" comme il dit, pour le récompenser de son dévouement. Et Danh Hiên d'assurer qu'il continuera consciencieusement sa "besogne préférée".

Le plus grand oiseau sur Terre

La grue à tête rouge (nom scientifique : Grus antigone) est inscrite dans le Livre Rouge des espèces menacées au niveau mondial. Il s'agit de la plus grande espèce d'oiseau, avec un mâle qui mesure parfois jusqu'à 1,8 m de hauteur. D'une beauté admirable, la grue présente un plumage gris clair, alors que sa tête, son cou et ses pattes sont d'un rouge vif. Si jadis, cette espèce était présente partout en Asie du Sud-Est, à présent, on ne la voit plus qu'au Vietnam et au Cambodge, parfois au Myanmar. Au Vietnam, elles apparaissent à la saison sèche dans certaines régions du delta du Mékong et aussi dans les Parcs nationaux de Yok Dôn (hauts plateaux du Centre) et de Lo go-Xa Mat (province de Tây Ninh, Sud).

Nghia Dàn/CVN

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