À Londres, les tours poussent comme des champignons

Autrefois, Big Ben et la cathédrale Saint-Paul dominaient le ciel londonien tandis que Peter Pan survolait des maisons minuscules, une époque irrémédiablement révolue du fait des gratte-ciel qui poussent à un rythme effréné aujourd’hui et transfigurent la capitale britannique.

Une vue de la ville de Londres et ses gratte-ciels.

Deux cent trente-sept tours de plus de vingt étages sont en cours de construction, ou ont obtenu un permis, selon une étude réalisée en 2014 par la New London Architecture (NLA), un club de réflexion fondé en 2005 pour fournir une information indépendante sur la construction immobilière à Londres. Avec à la clé un changement considérable de la physionomie d’une ville qui a pour habitude de vanter sa dimension humaine et ses maisonnettes victoriennes de brique rouge à trois étages.

Le chiffre a étonné jusqu’aux autorités londoniennes dans une mégapole où chaque quartier accorde ses propres permis de construire et où il n’y a pas d’organisme public chargé de centraliser ce genre d’informations.

«Le nombre de tours que nous allons voir sortir de terre au cours des dix prochaines années va changer le visage de Londres davantage qu’il ne l’a été à n’importe quelle autre période de son histoire, à part peut-être quand Saint-Paul a été construite. Nous allons assister à quelque chose qui va réellement changer la ligne d’horizon dans le centre et l’image de Londres», a déclaré Peter Murray, président du NLA.

Poussée démographique

La cathédrale du XVIIe siècle mesure 111,3 mètres, soit pratiquement le tiers du Shard (306 mètres), le plus haut gratte-ciel d’Europe qui s’élève dans le quartier de Southwark.

Deux cent trente-sept tours de plus de vingt étages sont en cours de construction à Londres, ou ont obtenu un permis.

La frénésie de construction est principalement liée à la poussée démographique que connaît la ville, explique M. Murray. «Cent mille personnes supplémentaires arrivent chaque année ce qui signifie que la population va passer de 8,3 millions actuellement à 10 millions d’ici 2030 et probablement 13 millions d’ici 2050. Nous devons donc fournir plus de logements». Près de 80% de ces nouvelles tours auront en effet un usage résidentiel. Elles seront construites essentiellement dans les quartiers de la City (Centre), de Canary Wharf (Est) et le long de la rive sud de la Tamise.

Mais contrairement aux tours de béton à l’esthétique douteuse construites dans les années 1960-1970 pour accueillir les populations les plus modestes, les bâtiments en gestation «sont destinés à des personnes riches», souligne-t-il.

Les tours qui sortent actuellement de terre offrent des façades reluisantes, et les appartements qu’elles abritent dans leurs étages les plus élevés se négocient des millions de livres. Elles présentent aussi des formes originales qui rompent souvent avec leur environnement immédiat et leur valent des surnoms imagés, tels le Gherkin (cornichon) en forme d’ogive de l’architecte britannique Norman Foster ou le Walkie-Talkie de l’Uruguayen Raphaël Vinoly. Cette transformation ne fait pas que des heureux. Kieran Long, commissaire à l’architecture au musée Victoria et Albert de Londres, craint la perte du caractère géorgien du centre-ville, avec ses rues entrelacées.

«Médiocre» ou «brillant», les avis divergent

«Ces immeubles de taille élevée présentent souvent des fondations très épaisses qui transforment complètement le caractère des rues autour d’eux», dit-il, citant en particulier les formes rondes du «Gherkin», «la première courbe apparue dans la City. C’est une forme complètement étrangère». «Certains de ces immeubles ont causé des dégâts», estime-t-il.

Les tours qui sortent actuellement de terre offrent des façades reluisantes.
Photo : AFP/VNA/CVN

Autre point noir, juge M. Long : les prix grimpent dans les bâtiments situés à proximité de ces grands ensembles, qui se transforment en bureaux, tandis que les commerces de proximité disparaissent, remplacés par des chaînes de restauration destinées à nourrir les employés du coin.

«Je sens que nous perdons quelque chose de fondamental avec le rejet des gens» de ces quartiers, dénonce-t-il.

Pour les signataires d’une lettre publiée dans le journal dominical The Observer - signée par des architectes, des associations de quartier et de préservation du patrimoine entre autres - «plusieurs de ces gratte-ciel sont d’une qualité architectonique médiocre» et menacent «le caractère unique de Londres et son identité».

Tout le monde n’est toutefois pas de cet avis. Pour Andy Arwood, un promeneur, le Walkie-Talkie est «incroyable». «Dire qu’il y a tant d’édifices ennuyeux à Londres et que quelqu’un a dessiné ça. Je pense que c’est brillant», ajoute-t-il.

Un autre promeneur, Neal Davies, rappelle lui que le changement a toujours eu des adversaires depuis l’âge médiéval. «Quand la Tour de Londres a été construite, elle ne plaisait pas non plus aux gens».

AFP/VNA/CVN

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