Agent orange : une «attente légitime» à la base du procès Trân Tô Nga

Me Bertrand Repolt et Me Amélie Lefebvre, avocats français du cabinet «Bourdon et Forestier», étaient en visite de travail au Vietnam du 1er au 3 août, sur invitation de l’Association des victimes de l’agent orange/dioxine (AVAO) de Hô Chi Minh-Ville. Ils ont accordé une interview au Courrier du Vietnam sur le procès Trân Tô Nga, lié à l’agent orange déversé au Vietnam durant la guerre contre les Américains.

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Me Bertrand Repolt et Me Amélie Lefebvre reviennent sur la procédure engagée par Trân Tô Nga, 73 ans, une Française d’origine vietnamienne qui a été exposée à l’agent orange pendant la guerre du Vietnam, devant le Tribunal de grande instance d’Évry contre les firmes américaines qui ont fourni l’agent orange.

Où en est la procédure de Trân Tô Nga ?

Me Bertrand Repolt.

Bertrand Repolt : Nous n’avons pas encore eu de réponse sur ce qui nous intéresse véritablement dans les demandes formées dans notre assignation : la responsabilité des sociétés. Nous avons seulement reçu des conclusions qui tentent de nous contraindre à communiquer davantage de pièces. En effet, les défenderesses estiment que notre assignation serait mal fondée ou, en tout cas, pas suffisamment documentée. Or, nous savons que nous avons beaucoup d’autres documents à produire. Et nous aurons le temps de le faire. Il s’agit donc avant tout d’un argument dilatoire.

Seules cinq sociétés ont pour l’heure envoyé des conclusions sur ce point plutôt périphérique, dont nous allons nous débarrasser assez rapidement. Les autres n’ont rien communiqué.

Lors de l’audience de mise en état du 18 juin dernier, la première véritable audience, j’ai rencontré les avocats de toutes ces sociétés. Leur comportement était tout à fait aimable et cordial. Il n’y a pas eu de difficultés et je ne pense pas qu’il y en aura. Ce sont des relations professionnelles et cordiales.

Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce procès ?

Me Amélie Lefebvre.

Amélie Lefebvre : Il y a deux choses qui nous intéressent réellement.

D’une part, qu’avons-nous comme arme ? Nous avons Mme Nga. Mais nous avons aussi toutes les victimes qui nous offrent leur soutien et leur présence. Elles savent et ont accepté que, d’un point de vue juridique, procédural, elles ne feraient pas partie du procès en France. Néanmoins, elles sont présentes. Nous en avons rencontré. Et nous le ferons encore. Les victimes sont donc notre première «arme».

D’autre part, les sociétés défenderesses s’inscrivent, comme beaucoup d’autres multinationales, dans un discours et une communication sur le respect de l’environnement, l’éthique, le comportement socialement responsable, prônant les actions positives pour le développement. Ce dossier est l’occasion parfaite pour elles d’être à la hauteur de ce que prétend leur communication. Qu’elles le soient fait justement partie de notre plan, de nos convictions, de ce qui nous anime et nous fait aller de l’avant.

Les avocats du cabinet Bourdon ont-ils confiance en vous pour la suite du procès ?

Me Bertrand Repolt et Me Amélie Lefebvre à côté des victimes de l’agent orange/dioxine au Musée des vestiges de la guerre à Hô Chi Minh-Ville.

Amélie Lefebvre : J’ai envie de répondre oui, évidemment. Je ne vais pas dire que le plus dur est derrière nous. C’est un travail de fond que nous menons depuis longtemps, depuis avant l’assignation. Nous avons des moments de découragement, forcément. Notamment en ce qui concerne la durée de la procédure. Il nous arrive de nous remettre en question, de nous décourager. Mais à chaque fois, ça ne dure que quelques instants. Dans tous les cas, nous voulons aller jusqu’au bout.

Quels sont les soutiens les plus efficaces, notamment du côté vietnamien, pour gagner ce procès ? L’opinion publique peut-elle vous aider ?
Amélie Lefebvre :
En ce qui me concerne, la réponse est évidemment oui. C’est un dossier compliqué parce qu’il mêle le droit à l’histoire. Une histoire qui elle-même est complexe. C’est un dossier qui est aussi assez lourd émotionnellement. Il est presque physique. Nous travaillons beaucoup dessus. Si l’on se sent découragé, nous avons, comme je l’ai déjà mentionné, un énorme soutien derrière nous. Il est donc impossible de laisser tomber. Nous avons aussi les cadeaux que les victimes vietnamiennes de l’agent orange/dioxine nous ont offerts. Ils sont dans nos bureaux. Lorsque nous les regardons, nous savons que ces victimes comptent sur nous. Elles ne nous laissent pas tomber et nous ne les laisserons pas tomber non plus.

Marche pour les victimes de l’agent orange à Hô Chi Minh-Ville, le 2 août.

Bertrand Repolt : Comme l’a dit Amélie, ce soutien nous encourage et nous responsabilise. Il y a une attente légitime à la base de cette procédure. Nous travaillons en l’ayant à l’esprit. C’est ainsi que nous donnerons le meilleur de nous-même, plus que dans n’importe quel dossier !


Propos recueillis par Nguyên Dat/CVN

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